Le mariage alchimique d’Alistair Crompton – Robert Sheckley

Alistair Crompton a été soigné un peu trop tard dans son enfance d’une schizophrénie sévère. Deux de ses personnalités ont été extraites et implantées dans des androïdes, et à trente ans comme la loi le lui permet, il décide de les récupérer, s’engage dans un périple vers deux planètes très lointaines. Il multiplie les rencontres surréalistes d’une étrangeté toute naturelle dans un monde à la richesse et à la diversité infinies ou presque. Il nage dans les paradoxes du morcellement de l’identité et de l’incarnation asynchrone d’un être multiple et diminué en quête de complétude.
L’extravagance joyeuse et le décalage humoristique sont sans limites au contact d’espèces dépaysantes, le non-sens préside à nombre de situations théâtrales, Robert Sheckley traite avec légèreté du conflit de personnalités aux motivations exotiques l’une pour l’autre, forcées de se côtoyer. L’idée de départ est très bonne, une quête cosmique et entropique, une plongée suicidaire dans un chaos incertain, une espèce de fantasy déjantée dans une sorte de space opera tragicomique aux échos psychologiques et même ontologiques.

[16/05/24] Pour donner une autre ampleur à sa nouvelle Le temps des retrouvailles, Robert Sheckley fait de son héros un génie de la parfumerie, l’occasion de laisser libre cours à sa créativité en botanique exotique pour apporter une saveur de fantasy et une promesse de voyage s’approchant du space opera, avec en plus le remplacement de Mars et de Vénus par Aaia et Ygga autrement plus lointaines. La première partie sert également à créer une intrigue secondaire qui trouvera son utilité à la fin, faisant de Crompton un voleur qui sera poursuivi et apportant en conséquence une pression digne d’un polar ou d’un thriller mais vite oubliée. L’explication scientifique de la scission des personnalités n’a pas le même besoin urgent que dans la nouvelle d’apparaitre dans le récit, remplacée par l’illustration d’un voyage au travers d’un trou de ver, et le projecteur Mikkleton a disparu. La situation qui pousse Loomis à rejoindre Crompton diffère pour être rallongée. En plus de cette modification et l’ajout de la première partie, tout le texte est truffé de détails et de références qui le hissent à un niveau de folie incomparable avec la nouvelle simple et efficace. Le climax est atteint dans la dernière partie qui prolonge la nouvelle en rendant l’histoire comme irréelle dans une cosmogonie immatérielle, une transmutation qui développe avec insistance les différentes cultures extra-terrestres puis insiste sur la décentralisation de Crompton dans ce monde dépeint.

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